LA MALADIE HEMORROIDAIRE
Publié par le Février 23 2008 16:01:47
Qu'appelle -t-on hémorroïdes ?

Il est souvent difficile de donner une seule définition des hémorroïdes parce que, sous ce terme, les personnes ne parlent pas toujours de la même chose.
Pour les observateurs (médecins, anatomistes), les hémorroïdes sont des éléments normalement présents au niveau de l'anus. Il ne s'agit pas de simples veines mais des lacs sanguins associés à des petits vaisseaux : l'ensemble est regroupé en structures ayant des formes de grappes de raisin unies entre elles et à la paroi de l'anus. On sépare habituellement les hémorroïdes de la partie profonde de l'anus qui ont un aspect de coussinet violacé (hémorroïdes internes) de celles qui sont immédiatement à l'entrée de l'anus, uniquement visibles lors de complications (hémorroïdes externes).

Les hémorroïdes internes ne peuvent pas être identifiées par un simple toucher : pendant la consultation, il faut introduire dans l'anus, un appareil non traumatisant (anuscope) pour les examiner.

Pour les personnes qui en souffrent (les malades), les hémorroïdes sont l'ensemble des signes qui créent une gêne au niveau de l'anus. Il peut s'agir d'une ou plusieurs tuméfactions, d'un prolapsus, de brûlures, de démangeaisons de suintements ou de saignements.
On distingue habituellement trois situations fréquentes:

- la thrombose hémorroïdaire externe (hémorroïdes externes) se caractérise par une tuméfaction douloureuse d'apparition brutale, siégeant à l'entrée de l'anus : cette anomalie ne dure habituellement pas plus de 7 à 10 jours.

- la crise hémorroïdaire (hémorroïdes internes) se traduit par une sensation de tension et de brûlure à l'intérieur du canal anal. Ces signes ne durent habituellement pas plus de quelques jours.

- les phénomènes non douloureux peuvent être un prolapsus intermittent ou permanent provenant de l'intérieur de l'anus (on parle aussi de procidence), de saignements, de démangeaisons (hémorroïdes internes). Ces signes sont souvent chroniques c'est-à-dire qu'ils durent longtemps ou sont permanents.

Aucune des plaintes (on parle de symptômes) décrites ne signe avec certitude une maladie hémorroïdaire : d'autres maladies de l'anus ou de l'intestin peuvent donner des signes absolument identiques (douleurs saignements, brûlures). C'est pourquoi :
- on ne connaît pas précisément la fréquence de la maladie hémorroïdaire (moins d'un tiers des gens qui souffrent consultent) ;
- les symptômes chroniques doivent inciter à consulter un médecin parce qu'ils peuvent être liés à une autre maladie que les hémorroïdes.


Quels sont les facteurs qui déclenchent ou aggravent les hémorroïdes ?

De nombreuses incertitudes persistent sur les causes de la maladie hémorroïdaire. On ne sait pas très bien si les plaintes sont en rapport avec une maladie des vaisseaux (mais les hémorroïdes ne sont pas des veines) ou s'il s'agit d'une maladie du système de fixation (ou d'ancrage) des hémorroïdes (leur mobilité et leur taille dans l'anus seraient responsables des signes).
De nombreux facteurs déclenchants ont été proposés mais très peu d'entre eux ont fait l'objet d'études suffisamment poussées pour les impliquer de façon certaine. Parmi les facteurs les mieux documentés, on retient les troubles du transit intestinal (constipation mais aussi diarrhée), certains agents irritants médicamenteux (certains laxatifs, suppositoires utilisés dans la constipation) ou alimentaires (épices), la grossesse et l'accouchement.

Quels types de traitement peuvent être envisages ?

Trois grands types de traitements sont proposés : les traitements médicamenteux, les traitements instrumentaux et les traitements chirurgicaux.

Les traitements médicamenteux consistent à calmer la douleur (médicaments antalgiques ou anti-inflammatoires), régulariser le transit intestinal (laxatifs), à améliorer le flux veineux (médicaments dits veino-toniques), à diminuer l'œdème et à calmer l'inflammation locale (suppositoires et crèmes), protéger la paroi du canal anal (crèmes et suppositoires). On ne dispose aujourd'hui que de peu d'études scientifiques apportant formellement une certitude d'efficacité de ces produits.

Les traitements instrumentaux sont faits pendant la consultation. Ils ont tous pour but de renforcer le soutien des hémorroïdes internes en créant une zone cicatricielle au sommet de ceux-ci. Ils ne suppriment pas les hémorroïdes. La constitution d'une zone cicatricielle repose sur la création d'une brûlure minime de la paroi par un agent chimique (sclérose), électrique (électrocoagulation), thermique (photocoagulation) ou par l'apposition d'une succion localisée au sommet de l'hémorroïde (ligature élastique). Ces traitements sont dans l'ensemble bien tolérés parce qu'ils sont effectués sur une zone non sensible de l'anus. Les complications observées après ces gestes concernent moins de dix pour cent des malades : il s'agit surtout de douleurs et de saignements. Les effets ne se font pas sentir immédiatement et il faut parfois répéter une à deux fois les séances. La disparition des signes concernent plus de deux personnes sur trois durant la première année qui suit le traitement. Néanmoins les effets bénéfiques ont tendance à s'atténuer avec le temps.

La chirurgie des hémorroïdes fait globalement appel à trois méthodes.

Une petite intervention (dite thrombectomie) peut être effectuée sous anesthésie locale en consultation s'il faut enlever une zone hémorroïdaire externe douloureuse.

Une intervention classique (dite hémorroïdectomie de type Milligan Morgan) est réalisée sous anesthésie générale lorsqu'on veut enlever les hémorroïdes externes et internes. L'ablation concerne habituellement les trois zones les plus larges (trois paquets), les plaies sont laissées ouvertes ou partiellement fermées. Les suites de l'intervention sont habituellement douloureuses au moins pendant les 10 premiers jours chez huit personnes sur dix. La douleur est plus intense au moment de la selle. Elle nécessite souvent le recours à des calmants puissants comme la morphine et les médicaments anti-inflammatoires. La cicatrisation est lente. Elle est achevée en moyenne 4 à 6 semaines après l'intervention. Ce geste impose en moyenne trois à quatre semaines d'arrêt de travail. La durée d'hospitalisation varie beaucoup d'un centre à l'autre (entre un et cinq jours) et d'un malade à l'autre. Les complications sont fréquentes : elles concernent une personne sur cinq. Dans la période précoce, il s'agit de difficultés transitoires à la reprise du transit ou à uriner, des saignements abondants qui peuvent survenir parfois plusieurs jours après l'intervention. Dans la période tardive, il s'agit d'un rétrécissement cicatriciel de l'anus ou de difficultés (en règle générale, modérées) à contrôler les gaz et les selles.

Une nouvelle intervention est développée en Europe (dite anopexie), qu'on peut considérer comme à mi-chemin entre le traitement instrumental et l'intervention classique. Cette méthode consiste à faire une sorte de " lifting " du canal anal en enlevant une bande de revêtement au sommet des hémorroïdes internes. Cette méthode ne réalise pas l'ablation des hémorroïdes mais on suppose qu'elle en réduit l'apport sanguin tout en renforçant le soutien
du tissu hémorroïdaire dans l'anus. Cette technique est deux fois moins douloureuse que l'intervention classique et elle immobilise le malade deux fois moins longtemps. On ne connaît pas l'efficacité de cette méthode à long terme. Les complications peuvent être un saignement, une infection ou des douleurs anormalement durables au niveau de la cicatrice profonde.

Quels choix de traitement pour quelles situations ?

Les traitements médicamenteux peuvent être utilisés dans le traitement des douleurs hémorroïdaires aiguës qui accompagnent la thrombose externe ou la crise hémorroïdaire. Ils ne sont donc justifiés que pour de courtes périodes de temps (en règle générale, une à deux semaines).
Les traitements instrumentaux constituent le traitement des hémorroïdes internes lorsqu'elles sont responsables de signes chroniques comme la procidence ou les saignements. La ligature a une petite supériorité d'efficacité par rapport aux autres méthodes instrumentales mais au prix d'une tolérance un peu moindre (douleurs).
Le traitement chirurgical minime d'une thrombose externe doit être proposé lorsque les douleurs sont importantes, que les signes sont d'apparition récente et que les conditions locales sont favorables : elle permet de soulager la douleur de façon rapide et efficace ; elle raccourcit la durée des signes liées à la thrombose.
Le traitement chirurgical classique est souvent réservé aux échecs des traitements instrumentaux. C'est la méthode qu'il faut proposer aux personnes très gênées et qui souhaitent une solution radicale.
L'anopexie est encore une technique chirurgicale qui mérite de nouvelles études pour préciser son bénéfice et sa place par rapport aux autres méthodes. Elle peut aujourd'hui être proposée aux personnes souffrant de saignement et d'une procidence (hémorroïdes internes) lorsque celles-ci craignent une immobilisation longue (activité professionnelle) ou des douleurs post-opératoires importantes.

Pour en savoir plus

Recommandations pour la pratique clinique pour le traitement de la maladie hémoroidaire site internet de la Société Nationale Française de Colo Proctologie

Sur ce site : Chirurgie des hémorroïdes : Quelles suites ?

American Society of Colon and Rectal Surgeons. Practice parameters for the treatment of hemorrhoids. The Standards Task Force Dis Colon Rectum 1993;36:1118-20

MacRae HM, McLeod RS Comparison of hemorrhoidal treatment modalities. A meta-analysis. Dis Colon Rectum 1995;38:687-94.

Surgical management of hemorrhoids. Patient Care Committee of the Society for Surgery of the Alimentary Tract (SSAT). J Gastrointest Surg 1999;3:214-5