Le testing fait son entrée dans les cabinets médicaux
Publié par hammar le Mars 27 2009 16:27:53
Le projet de loi sur l'hôpital autorise l'organisation de tests chez les médecins généralistes, spécialistes ou dentistes suspectés de discrimination à l'encontre de patients...

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Le projet de loi sur l'hôpital autorise l'organisation de tests chez les médecins généralistes, spécialistes ou dentistes suspectés de discrimination à l'encontre de patients. Les syndicats ne sont pas convaincus.

On connaissait le testing à l'entrée des discothèques, le testing sur les curriculum vitae, voici le testing dans les cabinets des médecins. Les députés ont en effet adopté jeudi une disposition reconnaissant cette méthode auprès des médecins et autres professionnels de santé. Objectif ? Confondre ceux qui refuseraient de soigner un patient titulaire de la CMU ou en raison de ses moeurs ou de son origine. L'article 18 du projet de loi «Hôpital, patients, santé, territoires» de la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, actuellement examiné à l'Assemblée, prévoit que des tests aléatoires pourront être utilisés auprès des médecins généralistes, des spécialistes ou des dentistes afin de «démontrer l'existence du refus discriminatoire». Selon le texte, une discrimination a lieu lorsqu'un médecin ou un dentiste refuse de soigner un patient titulaire de Couverture maladie universelle (CMU), de l'Aide médicale de l'Etat (AME) ou en raison notamment de ses moeurs, son origine ou son sexe.

Concrètement, le patient s'estimant victime d'un refus de soin illégitime devra saisir l'organisme local d'assurance maladie ou le conseil départemental de l'ordre concerné (médecins, dentistes...). Celui-ci pourra mettre en place des tests aléatoires. Puis le professionnel de santé mis en cause sera averti et éventuellement convoqué dans un délai d'un mois. Une commission de conciliation sera alors instaurée. Comme le souhaitait le gouvernement, les résultats du testing pourront être «des éléments de preuve recevables» devant cette commission. En cas d'échec de la conciliation, l'organisme local d'assurance maladie ou le conseil départemental de l'ordre concerné pourront prononcer une sanction financière.

À l'origine, le texte ne prévoyait pas le recours au testing et détaillait simplement le processus de saisie du conseil départemental ou de l'organisme d'assurance-maladie par un patient. C'est un sous-amendement du gouvernement qui l'a introduit. Le texte a également été amendé par le rapporteur UMP Jean-Marie Rolland. Ce dernier a supprimé l'inversion de la charge de la preuve. Précisément, dans la version originale du texte, il appartenait au médecin ou au dentiste de prouver que son refus de soin était justifié et dénué de toute discrimination. Mais plusieurs députés UMP ont dit craindre un «afflux de plaintes» ou une «stigmatisation des professionnels» face à un problème qualifié de «marginal» par Claude Leteurtre (NC), lui même chirurgien-orthopédiste. C'est désormais au patient d'alerter en cas de discrimination. L'utilisation du testing pouvant, le cas échant, lui servir d'argument.

Une décision qui «jette le discrédit»

Interrogés par le figaro.fr, les syndicats de médecins ne se montrent pas franchement convaincus par cette disposition. Très remonté, Michel Chassang, président du syndicat de médecins CSMF, déplore «un acharnement», une décision qui «jette le discrédit» sur sa profession. Il rappelle que les cas de discriminations restent ultra-minoritaires. Cela reste «inadmissible, mais de là à tester les médecins à leur insu …», explique-t-il. Il s'interroge également sur la méthode qui sera utilisée : «Les testeurs vont signaler d'entrée à leur médecin qu'ils sont titulaires de la CMU. Dans les faits cela ne se passe presque jamais comme cela !» Le ton est plus nuancé chez MG France, principal syndicat de généralistes. Son vice-président, Vincent Rébeillé-Borgella, explique : «S'il n'y a pas d'autres solutions, pourquoi pas ? Mais l'éthique médicale, qui explique que chacun doit être soigné quelles que soient ses ressources, devrait permettre à ce qu'on n'en vienne pas à ce genre d'extrémités». Le vice-président de MG France s'interroge sur les conséquences de cette pratique : «On va se mettre à douter de la réalité des maux des patients, or la relation avec ceux-ci est basée sur la confiance». Le testing doit donc être l'ultime recours à ses yeux.

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