L'hypertension au comptoir
Publié par La Pharmacienne le Avril 11 2009 08:26:11
Environ 15 millions de Français sont hypertendus. Parmi eux, quelque 8 millions l'ignorent. Le rôle du pharmacien est multiple: détecter, orienter et suivre un patient...

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Environ 15 millions de Français sont hypertendus. Parmi eux, quelque 8 millions l'ignorent. Le rôle du pharmacien est multiple: détecter, orienter et suivre un patient à risque.

CAS N°1 - «Lors de ma dernière consultation médicale, ma tension était légèrement élevée. Le médecin ne pense pas nécessaire de débuter un traitement anti-hypertenseur, mais m'a orienté vers un appareil d'automesure pour surveiller régulièrement ma tension.

Comment l'utiliser?


Il est recommandé de mesurer la pression artérielle (PA) en dehors du cabinet médical avant de débuter un traitement antihypertenseur médicamenteux:

- en cas de PA comprise entre 140-179/90-109 mmHg et en l'absence d'une atteinte des organes cibles, de diabète, d'antécédents cardio- ou cérébro-vasculaires, ou d'insuffisance rénale lors du bilan initial;

- chez le sujet âgé, dont la variabilité tensionnelle est augmentée et chez qui la fréquence de l'effet blouse blanche est important.

L'automesure a un double bénéfice: confirmer un diagnostic d'hypertension artérielle (HTA) et transformer le patient en acteur de sa propre santé. Cette méthode permet de corriger les erreurs de diagnostic par excès (HTA «blouse blanche») ou par défaut, plus rares (HTA masquée).

Deux types de modèles sont utilisés: les brassards huméraux au bras, ou les modèles adaptables au poignet. Ces derniers sont plus pratiques mais sont considérés comme moins fiables (risque de malposition de l'appareil lors de la mesure).

La liste des appareils électroniques validés (Microlife, Omron, Hartmann...) est consultable sur le site web de l'Afssaps. Certains appareils proposent un système de mesure MAM qui prend 3 mesures successives, afin de pondérer les variations de tension.

Une tension de 135/85 mmHg en automesure correspond à 140/90 mmHg au cabinet médical.


LES 10 REGLES D'OR DE L'AUTOMESURE

1. Prendre sa tension toujours à la même heure, car elle varie environ 100 000 fois par jour.
2. Ne pas fumer ou boire de café dans l'heure précédant la mesure.
3. Prendre sa tension après deux ou trois minutes de repos en position assise ou détendue.
4. Ne pas prendre sa tension en ayant une forte envie d'uriner.
5. Lire attentivement le mode d'emploi avant d'effectuer une mesure.
6. Maintenir le tensiomètre au poignet à hauteur du coeur pendant la mesure.
7. Ne pas bouger et ne pas parler pendant la mesure.
8. Attendre au moins une minute entre deux mesures consécutives.
9. Inscrire les résultats dans un carnet de mesures.
10. Prendre régulièrement sa tension.



CAS N°2 - «J'ai acheté un appareil d'automesure. Ma tension moyenne varie autour de 16/9. C'est supérieur à la normale, mais je ne suis pas décidé à consulter.

Qu'est-ce que je risque à avoir un peu de tension?


Découvrir une HTA n'a rien d'alarmant, mais il faut préciser les dangers de HTA négligée et non traitée. Il n'y a pas d'urgence à traiter si les valeurs sont inférieures à 180/105 mmHG. L'HTA constitue l'un des principaux facteurs de risque de pathologie cardiovasculaire.

Une pression artérielle excessive fatigue à terme la pompe cardiaque: ayant toujours à lutter contre l'hypertension, sa fonction peut se détériorer et engendrer une insuffisance cardiaque. L'association fréquente à une athérosclérose augmente le risque d'accident ischémique pouvant conduire à un infarctus du myocarde.

Les parois artérielles sont aussi fragilisées, y compris celles du cerveau, d'autant plus en cas de plaques d'athérome. La thrombose d'une artère ou une hémorragie cérébrale sont possibles. Leurs conséquences peuvent être désastreuses, laissant des séquelles neurologiques (paralysie, hémiplégie, troubles du langage), voire entraîner la mort.

En outre, l'HTA provoque des troubles de la vision qui peuvent être irréversibles et des effets délétères sur les reins et, à terme, engendrer une insuffisance rénale chronique.

L'énumération de ces risques encouragera certainement le patient à consulter! Le médecin aura 3 objectifs principaux: affirmer le caractère primaire de l'HTA, évaluer le risque cardio-vasculaire et préciser le retentissement viscéral.


CAS N°3 - «Mon médecin m'a diagnostiqué une hypertension modérée, et suggère de changer mes habitudes de vie avant de débuter un traitement médicamenteux.»


Dans 95% des cas, l'hypertension artérielle est dite essentielle ou idiopathique. Il n'y a pas de cause mais des facteurs de risques. L'objectif de la prise en charge est de faire baisser la tension et de limiter les facteurs de risque afin d'éviter les complications cardiovasculaires.

D'abord, proscrire le tabac. Associé au risque d'HTA, il majore celui de maladie cardiovasculaire (il génère de l'athérosclérose). Modérer aussi la consommation d'alcool et de vin.

Un régime alimentaire peut être suivi si nécessaire. La surcharge pondérale, l'obésité abdominale et l'hypercholes-térolémie sont autant de facteurs de risque de maladie cardiovasculaire. Ce régime repose sur une alimentation équilibrée: fruits et légumes frais, éviter les matières grasses animales, privilégier les matières grasses d'origine végétale.

Une activité physique régulière (plutôt un sport d'endurance, non violent, à choisir fonction de l'âge et des capacités) est un bon moyen de faire baisser la tension.

Enfin, le patient ne consommera pas plus de 10 g/24 h de sel de table. Les sels diététiques sans sodium s'y substituent.

Si la PA ne baisse pas malgré cela, il faut alors envisager un traitement médicamenteux.

Fatigue, vertiges, troubles de la concentration s'observent souvent en début de traitement. Mais en principe, l'organisme s'adapte vite à une tension plus basse et ces troubles s'estompent. Mais chaque classe médicamenteuse a des effets indésirables incontournables malgré la diminution de la posologie. Exemple: tous les IEC sont susceptibles d'induire une toux non productive, qui résiste aux antitussifs, accompagnée d'une sensation d'irritation pharyngée. Seuls l'arrêt et la substitution du traitement feront disparaître en quelques jours les symptômes. Les antagonistes calciques peuvent aussi être à l'origine d'effets indésirables bénins: maux de tête, rougeurs du visage, jambes enflées, oedèmes aux pieds, constipation. La fatigue, les troubles de la libido, les mains et les pieds froids, sont parmi les effets le plus souvent recensés des bêtabloquants. Un taux trop bas de potassium dans le sang, des crises de goutte et des crampes sont des effets secondaires connus des diurétiques. Les antagonistes de l'angiotensine II sont les mieux tolérés.

Il faut signaler l'HTA pour toute automédication. Les interactions sont nombreuses et certaines molécules sont déconseillées en ce cas (pseudoéphédrine...)