Publiée ce samedi dans la revue scientifique britannique The Lancet, cette découverte pourrait représenter à terme une alternative thérapeutique pour des milliers de patients: les grands brûlés, les personnes atteintes de maladies génétiques affectant la peau, mais aussi les diabétiques. Nombre d’entre eux connaissent en effet des ulcérations, comme des nécroses de l’épiderme au niveau des jambes.
Aujourd’hui, on sait déjà créer de la peau humaine par culture cellulaire à partir d’un échantillon du patient. Celle-ci est ensuite greffée pour reconstruire l’épiderme détruit. "Mais il faut trois semaines pour produire la quantité de peau suffisante. Pendant ce temps, le patient est mal protégé. Aujourd’hui, on utilise de la peau de cadavre pour réaliser un pansement provisoire. Il y a des risques de déshydratation, d’infection ou de rejet", explique Christine Baldeschi, à la tête du groupe Génodermatoses de l’I-Stem.
Les premiers essais sur l’homme d’ici trois à quatre ans
Après quatre ans de recherches, l’équipe dirigée par le biologiste Marc Peschanski est parvenue à "orienter" des cellules souches embryonnaires – aptes à donner naissance à tout type de cellule du corps humain et à se reproduire indéfiniment – vers un "destin épidermique". On obtient ainsi très rapidement des cellules prêtes à l’emploi, disponibles en quantité illimitée, capables de produire des cellules de peau. Après avoir réussi à reconstruire in vivo un épiderme avec ses différentes couches, des essais ont été effectués sur des souris. Résultat: douze semaines après la greffe de ces cellules, les rongeurs présentaient une peau humaine adulte normale et fonctionnelle.
A l’avenir, ces cellules prêtes à l’emploi seraient cultivées en permanence. "Elles seront greffées directement sur le patient, soit sous forme de cellules intégrées à un gel, soit sous forme de peau déjà reconstituée. Cela servira de pansement biologique et transitoire pendant les trois semaines précédant l’autogreffe, sans risque de rejet. A terme, on imagine que ces pansements seront laissés en place définitivement", avance Christine Baldeschi.
Pour l’équipe de l’I-Stem, l’un des 28 laboratoires français autorisés sur dérogation de l’Agence de la biomédecine à mener des recherches sur les cellules souches embryonnaires humaines, les perspectives sont nombreuses. "A partir d’un échantillon de peau on pourrait aussi reprogrammer les cellules en cellules souches, pour les retransformer en cellules de la peau ou tester des médicaments", ajoute la chercheuse. Les premiers essais cliniques sur l’homme devraient débuter d’ici trois à quatre ans, le temps de valider les applications techniques et d’obtenir l’aval des agences réglementaires.